mercredi 19 mai 2010

Vente de garage

Vente de garage. Noir et blanc. Des choses en noir et blanc décousues mal foutues des choses que même ma grand-mére a n’en veut pus.

Y viennent tout’ pour ça, han. Dans l’coin icitte y a pas grand-chose faque. C’est ça.

Des choses toutes graisseuses toutes tachées semi-déchirées. J’aime pas ça les odeurs moé. Oh non j’aime pas ça sentir le vieux. Le pouilleux. Le miséreux.

J’haïs don’ ben ça une belle grosse vente de garage au milieu de l’automne. Pourquoi faire qu’on fait ça quand tout’ les plantes y meurent, au lieu d’en plein cœur d’l’été comme tout l’monde. Pourquoi?

Dites-lé don’, qu’on déménage. C’pas sorcier. Pis vous-autres, z’avez pas à vous gêner. Ben non, circulez, sinon faites le tour voir jusqu’à quelle rangée vous allez tuffer. Des choses sales, étalées tout-croche, même pas classées par ordre de rapport, des souliers à côté des pneus de l’aut’ bord d’une boéte à bijoux cheapshot, avec des cendriers pis des plumes pis d’autres affaires z’avez juste à regarder vous z’allez être comme moé à’fin, tout’ écoeurés.

C’est dur icitte. On dirait le monde y jugent à partir de toutes les choses laides que t’étais avant d’te transformer en bonnevieillefemme de banlieue, avant d’mourir. Toutes les choses que j’suis devenues ç’a pus rien à voir avec ça, ça c’est l’gramophone à mon pére, pis les robes à bretelles lousses à ma mére, pis une tite vache qui servait à cacher les sous pis les dents qu’on avait un jour qu’on perdait l’lendemain. Chu pus d’même, moé.

Anéway on s’en va. Mais ça faut pas l’dire apparemment, pasque l’monde yé ben porté à nous juger une fois qu’y savent ça. Oué, apparemment. Je l’sais.

Entécas ça m’fait même pas cinquante cennes en une journée. Une belle grosse journée d’vente de garage comme j’es aime, comme j’trippe dessus cou’donc.

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